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Rapport final du Comité consultatif sur l'itinérance

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Rapport final du Comité consultatif sur l’itinérance [PDF - 417 Ko]

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Introduction

La composition du Comité consultatif sur l’itinérance, présidé par Adam Vaughan, secrétaire parlementaire du ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social (Logement et Affaires urbaines), a été annoncée en juin 2017. Les 13 membres du Comité, qui viennent de partout au pays et qui sont issus de milieux divers, ont travaillé avec diligence depuis l’annonce, à l’aide de conférences téléphoniques, d’une collaboration en ligne, de réunions en personne et de participation à des tables rondes régionales.

Les membres du Comité apportent avec eux une expérience à la fois riche et diversifiée. Collectivement, ils possèdent de l’expérience, dans de nombreux cas plus de 20 ans, en prestation de services dans les secteurs communautaires, des politiques et de la défense des droits. De plus, 2 membres ont vécu une situation d’itinéranceNote de bas de page 1 et offrent cette perspective, ainsi que celle de leurs clients vivant dans l’itinérance, à chaque discussion.

Nous aimerions reconnaître officiellement que la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance actuelle reflète les structures juridictionnelles existantes et historiques que la Commission de vérité et de réconciliation a identifiées comme des obstacles systémiques à la réconciliation. Cependant, un travailleur de première ligne qui a participé à notre processus d’engagement a déclaré que « loger les gens, quand c’est bien fait, c’est la réconciliation qui se réalise ». Les systèmes de logement et les personnes qui fournissent ces services doivent faire évoluer leurs pratiques afin qu’elles soient conformes aux appels à l’action de la Commission de vérité et de réconciliation. De plus, les principes de la Commission de vérité et de réconciliation doivent être utilisés pour guider l’interprétation, la mise en œuvre et la localisation des recommandations du présent rapport à mesure que la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance évolue et que l’on développe de nouveaux services.

Le Comité accepte les appels à l’action de la Commission de vérité et de réconciliation et la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA), et comprend que la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance est un élément de la discussion plus large, qui inclut tous les ordres de gouvernement, les peuples autochtones et leurs organisations.

Aperçu

L’itinérance touche divers segments de la population, dont les particuliers et les familles, les femmes fuyant la violence, les Autochtones, les jeunes et les aînés. Chaque année, entre 136 000 et 156 000 Canadiens ont recours à un refuge d’urgence. Environ 35 000 Canadiens vivent une forme quelconque d’itinérance chaque nuit. En 2014, le taux moyen d’occupation dans les quelque 15 000 refuges d’urgence au Canada était passé à plus de 90 %, ce qui témoigne de la probabilité que des refuges aient refusé des personnes faute d’espace.

Les taux de mortalité sont plus élevés chez les personnes qui vivent dans l’itinérance que chez les membres de la population canadienne, même les plus pauvres, qui occupent un logement. Si l’on inclut les dépenses publiques connexes dans les services sociaux, judiciaires et de la santé, le coût économique de l’itinérance est élevé. Selon certaines estimations, l’itinérance coûte annuellement plus de sept milliards de dollars à l’économie canadienne.Note de bas de page 2

Il est 10 fois plus probable que des Autochtones accèdent à des refuges d’urgence que les non-Autochtones. Ils représentaient approximativement 30 % de tous les utilisateurs de refuges en 2014, bien qu’ils ne représentaient qu’environ 5 % de la population canadienne. De plus, le gouvernement du Canada s’est engagé à répondre aux appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation et il est signataire de la DNUDPA (voir l’Annexe 1 pour consulter la liste des appels à l’action pertinents). Pour aider adéquatement les communautés autochtones à lutter contre l’itinérance, il faudra que ces engagements soient respectés.

Rôle de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance

La Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance est un programme communautaire qui vise à prévenir et à réduire l’itinérance, en offrant du financement à 61 collectivités désignées, des communautés autochtones et des collectivités rurales et éloignées de partout au Canada. D’abord lancée en 2007, la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance s’appuie sur l’ancienne Initiative nationale pour les sans-abri, qui avait été lancée en 1999.

Reconnaissant que l’itinérance est une responsabilité commune, la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance s’efforce d’améliorer les partenariats, afin de trouver des solutions à plus long terme à l’itinérance, de renforcer les capacités des collectivités et d’assurer la durabilité. Elle appuie le partage de la recherche et du savoir ayant pour objet d’approfondir la compréhension de l’itinérance et elle recueille et met en valeur des pratiques prometteuses, afin d’aider les collectivités à créer les solutions les plus efficaces.

Le gouvernement du Canada reconnaît qu’il n’est pas le seul au pays à financer des programmes de lutte contre l’itinérance. De fait, les investissements fédéraux dans les programmes de lutte contre l’itinérance sont en général considérablement inférieurs au financement octroyé par les gouvernements provinciaux, territoriaux et municipaux et aux investissements philanthropiques. Malgré la grande variation dans l’ensemble du pays, les rapports communautaires produits pour le volet Collectivités désignées (hors du Québec) révèlent que, pour chaque dollar investi par la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance, les provinces, les territoires et les autres partenaires ont contribués 12,66 $ durant l'exercice financier 2015 à 2016. L’essentiel de ces fonds provenait des provinces et territoires, comptant pour 68 % environ du montant national global.

Le modèle québécois de prestation de services et de conception de systèmes à intervenants multiples, combiné à des fournisseurs de services communautaires de première ligne indépendants, a été étudié à Montréal et à Québec. Des représentants du gouvernement provincial étaient présents pour fournir un contexte supplémentaire. L’accent mis par la province sur la prévention est une bonne pratique et a connu un succès marqué. Cela a déjà considérablement réduit l’itinérance chronique dans la province. Ainsi, les ententes de financement distinctes avec le Québec devraient reconnaître ce fait et soutenir ce modèle communautaire fondé sur la direction locale et le soutien préventif pour les personnes ayant impérieusement besoin d’un logement.

Un bon nombre des recommandations formulées dans le présent rapport visent à offrir un modèle semblable dans les provinces et les collectivités du Canada. Le soutien aux approches novatrices en matière de logement avec services de soutien est essentiel à l’évolution de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance et est nécessaire pour assurer le succès partout au Canada. À Halifax, on a fait valoir que la planification locale ne devrait pas avoir à changer pour s’adapter au programme, mais plutôt que le programme doit s’inspirer des plans locaux. Cela est particulièrement vrai au Québec.

La compétence partagée dans ce domaine fait des programmes de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance un modèle unique. La Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance a été conçue pour que les collectivités, en collaboration avec tous les ordres de gouvernement, utilisent les fonds fédéraux pour se procurer d’autres sources de financement. La Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance est appliquée différemment au Québec, aux termes de l’Entente Canada-Québec, un accord officiel en matière de financement, de gouvernance et d’exécution des projets.Note de bas de page 3

La Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance dans le contexte de la Stratégie nationale sur le logement

Tout au long des consultations de la Stratégie nationale sur le logement en 2016, les intervenants ont insisté sur le fait que l’itinérance devait être un élément clé de la Stratégie, comme première étape pour aider les personnes les plus vulnérables à trouver un logement sûr, stable et sécuritaire. Parmi les idées et les recommandations qui ont été formulées dans le cadre des consultations tenues sur la Stratégie nationale sur le logement se trouvent notamment celles-ci :

  • chercher à éliminer l’itinérance;
  • comprendre que le programme de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance doit entrecroiser et être intégré à la Stratégie nationale sur le logement et fournir un financement accru, à long terme et prévisible dans le cadre d’une nouvelle stratégie nationale de lutte contre l’itinérance;
  • hausser le nombre de collectivités désignées admissibles à un financement de base;
  • maintenir l’engagement envers Logement d’abord et la priorisation des personnes vivant en situation d’itinérance chronique et épisodique;
  • répondre aux besoins de populations spécifiques et prévoir à cette fin des adaptations ciblées de Logement d’abord, afin de répondre aux besoins propres des jeunes, des Autochtones, des femmes fuyant la violence et des anciens combattants;
  • en plus des efforts visant à faire en sorte que les personnes sans abri accèdent à un logement stable et permanent (sortir de l’itinérance), rehausser l’accent mis par la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance sur la prévention de l’itinérance (arrivée dans l’itinérance) ainsi que l’investissement à cet égard.

Mandat et activités du Comité

Le Comité appuie le remaniement de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance d’Emploi et Développement social Canada après l'exercice financier 2018 à 2019.

Le Comité a été appelé à mener les activités suivantes dans le cadre de son mandat :

  • examiner plus en détail les idées et les recommandations exprimées lors des activités de mobilisation de la Stratégie nationale sur le logement;
  • mener des activités de mobilisation ciblées auprès d’experts en itinérance, ainsi que de collectivités et d’autres intervenants de partout au Canada;
  • analyser des options spécifiques pour le remaniement de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance;
  • présenter ses conclusions et des options ayant trait au remaniement du programme au ministre Duclos.

Le mandat et les activités du Comité sont également façonnés par les objectifs énoncés par ministre Duclos pour la Stratégie nationale sur le logement, plus particulièrement une réduction de 50 % de l’itinérance chronique d’ici l'exercice financier 2027 à 2028.

À l’appui de ses activités, le Comité s’est réuni à 5 reprises depuis le mois de juin, et les membres ont pris part à des tables rondes dans 8 villes : Halifax, Toronto, Winnipeg, Vancouver, Yellowknife, Montréal, Québec et Calgary. Les membres ont également assisté à une séance de mobilisation avec les représentants des conseils consultatifs communautaires et des entités communautaires à la conférence nationale de l’Alliance canadienne pour mettre fin à l’itinérance, qui a eu lieu à Winnipeg. À chaque endroit, ils ont constaté un vaste soutien au leadership exercé par le gouvernement du Canada dans le domaine de l’itinérance, par l’entremise de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance. De plus, les membres du Comité ont examiné la quantité croissante de données probantes provenant de juridictions où l’itinérance a été réduite, et entrepris leur propre mobilisation auprès des intervenants et de leurs réseaux dans leur propre région et auprès d’organisations de partout au pays et de l’étranger.

Il convient de souligner encore une fois les séances tenues à Montréal et à Québec, ainsi que les visites guidées des logements en milieu de soutien dans ces villes. Au cours de ces visites, bien que l’on ait appuyé le modèle du programme Logement d’abord, il était clair que pour maintenir une réduction importante de l’itinérance chronique et pour mettre davantage l’accent sur la prévention, il faut compter sur un soutien intense à la maison et à l’extérieur de la maison dans le cadre d’un système évolué de soins et de logement pour les personnes en situation précaire de logement. Pour obtenir du succès, il est essentiel d’offrir des mesures de soutien axées sur les besoins de la personne. Bien qu’il soit plus difficile de recueillir des données, en particulier sur l’admission au programme, cette approche devrait quand même faire partie de l’Entente Canada-Québec, parce qu’on souhaite la mise en place d’un système national et qu’il nous faut comprendre les causes qui amènent les bénéficiaires à intégrer le programme et à en sortir. Il est également essentiel parce que des sous-populations distinctes peuvent être mal desservies si elles ne font pas l’objet d’un suivi.

Recommandations

Dans cette section

  1. Un comité consultatif permanent de personnes ayant une expérience vécue
  2. Adoption d’une définition nationale de l’itinérance
  3. Coordination des systèmes locaux de lutte contre l’itinérance
  4. Élaboration d’une stratégie nationale de données
  5. Logement d’abord
  6. Hausser le nombre de collectivités désignées visées par la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance
  7. Répondre aux besoins des sous-populations à risque d’itinérance
  8. Financement accru pour le Nord
  9. Recentrer le financement national
  10. Prévention
  11. Faire respecter le droit au logement pour les Canadiens en situation d’itinérance
  12. Harmoniser la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance avec la Stratégie nationale sur le logement et coordonner les mesures fédérales sur l’itinérance

Le Comité formule les recommandations suivantes pour le remaniement de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance.

1. Un comité consultatif permanent de personnes ayant une expérience vécue

Discussion

Le Comité croit en l’importance d’inclure des personnes qui ont une expérience vécue de l’itinérance, dans tous les aspects de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance. Cela inclut, fournir un soutien financier pour permettre l’inclusion des personnes ayant une expérience vécue qui est adéquate et équitable au niveau communautaire, ainsi que créer un mécanisme d’inclusion au niveau national.

Recommendations

1.1 Établir un comité consultatif permanent de personnes ayant une expérience vécue de l’itinérance qui reflète la diversité complète des expériences de l’itinérance, afin de fournir des avis et des conseils au ministre Duclos. Ce comité devrait bénéficier de soutiens financiers et techniques pour son travail. Ce soutien devrait tenir compte des traumatismes, afin de faciliter la participation entière des membres du comité. Pour soutenir la pleine participation, il est également essentiel de disposer des ressources pour l’éducation et le mentorat afin de tirer pleinement parti du rôle crucial que peuvent jouer les personnes ayant une expérience vécue dans l’élaboration des politiques.

1.2 Le comité consultatif permanent devrait également refléter la diversité du Canada ainsi que favoriser la participation de toute la gamme des personnes qui vivent l’itinérance.

2. Adoption d’une définition nationale de l’itinérance

La Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance actuelle n’a aucune définition de l’itinérance, à part de la définition d’itinérance chronique et épisodique. Par conséquent, l’itinérance pour de nombreuses collectivités désignées visées par la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance a été définie de façon restrictive comme étant le système de l’itinérance « traditionnel », étant les refuges d’urgence ou le fait de dormir dans la rue (c'est-à-dire, dormir à l’extérieur). Cette situation peut créer des barrières pour certains Canadiens lorsqu’il s’agit d’accéder aux programmes de Logement d’abord, financés par la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance. Cette situation peut également mener à sous-estimer et avoir une mauvaise compréhension de l’ampleur et de la nature de l’itinérance au Canada.

Discussion

L’absence d’une définition convenue plus large de l’itinérance crée un désavantage critique pour ce qui est de l’accès aux fonds de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance pour les femmes, les jeunes, les personnes qui s’identifient comme LGBTQ2, les Autochtones et ceux qui pourraient éviter les systèmes de lutte contre l’itinérance traditionnels, seraient considérés comme des « personnes en situation d’itinérance cachée » ou pourraient avoir accès à d’autres systèmes comme les refuges pour femmes victimes de violence. Il est également important de comprendre que l’itinérance n’est pas un état statique, mais bien une expérience fluide dans laquelle les circonstances et les options de logement peuvent varier considérablement et fréquemment.Note de bas de page 4

L’absence d’une définition plus large aura également pour effet d’amener le gouvernement du Canada à sous-estimer considérablement l’ampleur et l’incidence de l’itinérance et de l’instabilité du logement. La portée nationale de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance n’est pas une tentative d’outrepasser l’autonomie provinciale, territoriale et autochtone, car il nous importe de respecter les domaines de compétence de chacun et de les mobiliser de manière responsable.

La définition de l’Observatoire canadien sur l’itinérance est fondée sur la recherche internationale. Elle a été mise à l’essai auprès d’intervenants canadiens et est largement adoptée dans les collectivités partout au Canada. De plus, l’Observatoire canadien sur l’itinérance a élaboré une définition de l’itinérance chez les AutochtonesNote de bas de page 5, qui tient compte des différences historiques, expérientielles et culturelles des peuples autochtones, ainsi que des expériences de colonisation et de racisme en matière d’itinérance. Cette définition autochtone a été publiée à l’automne 2017 et devrait également être prise en considération avec la définition révisée de l’Observatoire canadien sur l’itinérance.

La définition révisée de l’Observatoire canadien sur l’itinérance a été rendue publique à l’automne 2017 et se lit comme suit :

  • Le terme « itinérance » désigne la situation dans laquelle se trouve une personne, une famille ou une collectivité qui n’a pas de logement stable, permanent et adéquat, ou qui n’a pas de possibilité, les moyens ou la capacité immédiate de s’en procurer un. C’est le résultat d’obstacles systémiques ou sociétaux, d’un manque de logements abordables et adéquats, de défis financiers, mentaux, cognitifs, comportementaux ou physiques qu’éprouvent un individu ou une famille, et/ou de racisme et de discrimination. La plupart des gens ne choisissent pas d’être sans-abri, et l’expérience est généralement négative, désagréable, néfaste, dangereuse, stressante et affligeante.
  • L’itinérance décrit une variété de situations liées à hébergement, allant d’individus sans abri, aux personnes logées de façon non sûre. Ceci dit, l’itinérance englobe une variété de situations de vie physique qui est organisée ici dans une typologie comprenant : 1) les personnes sans abri, ou les personnes absolument sans abri qui vivent dans la rue ou dans des lieux qui ne sont pas conçus pour le logement des êtres humains; 2) les personnes utilisant les refuges d’urgence, y compris celles qui restent dans les refuges d’urgence de nuit pour les sans-abri, ainsi que refuges pour les personnes affectées par la violence familiale; 3) les personnes logées provisoirement, signifiant les personnes dont l’hébergement est temporaire et qui ne possèdent pas le droit au maintien dans les lieux, et enfin; 4) les personnes à risque d’itinérance, soit des personnes qui ne sont pas sans abri, mais dont la situation économique ou de logement courant est précaire ou ne satisfait pas aux normes publiques de santé et de sécurité. Nous notons que pour bon nombre de personnes, l’itinérance n’est pas un état statique, mais plutôt une expérience fluide dans laquelle les circonstances et options de logement peuvent varier et changer de façon dramatique et fréquemment.
  • Le problème de l’itinérance et de l’exclusion liée au logement est le résultat de la rupture de notre contrat social; le manquement de la société à assurer que des systèmes, un financement et des soutiens adéquats sont mis en place de telle sorte que tous les individus, même en situation de crise, aient accès à un logement et aux soutiens dont ils ont besoin. L’objectif de l’élimination de l’itinérance est d’assurer la stabilité de logement pour que les gens puissent avoir une adresse fixe et un logement adéquat (abordable, sûr, entretenu adéquatement, accessible et d’une taille convenable) et avoir accès à un revenu, aux services et aux soutiens nécessaires à leur bien-être, et de réduire les risques qu’ils retombent dans l’itinérance. Cela signifie qu’il faut se concentrer à la fois sur la prévention et les sorties durables de l’itinérance.
  • Dans l’esprit du plan d’action de la Commission de vérité et de réconciliation, la définition de l’itinérance reconnaît la surreprésentation des peuples autochtones (y compris les Premières Nations, les Inuits et les Métis) parmi la population des sans-abri du Canada résulte de la colonisation et du génocide culturel. La définition de l’itinérance autochtone au Canada met en lumière la nécessité de prendre en considération les perspectives historiques, expérientielles et culturelles des peuples autochtones, ainsi que de l’expérience continue de la colonisation et du racisme en tant qu’élément central pour comprendre et lutter contre l’itinérance autochtone. De plus, de nombreuses populations telles que les jeunes, les femmes, les familles, les personnes souffrant de maladies mentales et/ou de problèmes d’accoutumances, les personnes touchées par la violence, les personnes âgées, les anciens combattants, les immigrants, les réfugiés, les personnes ethnoraciales et racialisées, et les membres des communautés LGBTQ2S, vivent l’itinérance en raison d’un regroupement unique de circonstances, et par conséquent, les interventions communautaires doivent être appropriées et tenir compte de cette diversité
    Note de bas de page 6.

Recommendations

2.1 Le gouvernement du Canada adopte une définition nationale et une typologie de l’itinérance telle qu’énoncée ci-dessus.

2.2 Une définition de l’itinérance autochtone a été développée par l’Observatoire canadien sur l’itinérance et il est recommandé de l’appliquer à l’ensemble du programme de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance lorsque des peuples autochtones sont soutenus.

3. Coordination des systèmes locaux de lutte contre l’itinérance

La plus grande force du programme de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance aujourd’hui tient au fait que celui-ci soit axé sur la collectivité et que le modèle de planification communautaire ait servi de fondement à la collaboration dans les collectivités partout au pays. Toutefois, le modèle de planification communautaire a été axé sur les programmes (sur les investissements individuels des programmes) par opposition aux résultats communautaires (un système local coordonné et des programmes axés sur la réduction de l’itinérance). L’expérience au Canada et aux États-Unis a montré l’importance d’adopter une approche systémique, en développant des systèmes locaux relatifs à l’itinérance et fondés sur les données.

Discussion

Au Canada et aux États-Unis, l’expérience démontre que la réduction de l’itinérance chronique et épisodique se produit dans les communautés dotées de systèmes locaux coordonnés de lutte contre l’itinérance et fondés sur les données. Ces systèmes reposent sur la philosophie Logement d’abord et [traduction] « coordonnent diverses ressources pour s’assurer que les efforts s’harmonisent avec les objectifs de réduction de l’itinérance »Note de bas de page 7

Il y est possible de changer le plan communautaire pour les collectivités désignées de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance pour des plans systémiques comprenant :

  1. des objectifs et des jalons temporels convenus en matière de prévention et de réduction de l’itinérance;
  2. un plan visant à recueillir et à tenir à jour des données en temps réel sur toutes les personnes en situation d’itinérance dans la collectivité et un moyen de suivre et de signaler les résultats au niveau du système (par exemple, la durée du séjour dans un refuge, le passage à l’itinérance, le nombre de personnes sans abri, les sorties de l’itinérance, les retours à l’itinérance);
  3. la mise en œuvre d’un système d’information sur la gestion de l’itinérance (comme le SISA), pour harmoniser la collecte de données, la production de rapports, la prise en charge, l’évaluation et les aiguillages afin de permettre une prestation coordonnée des services;
  4. un processus de mobilisation continue des personnes ayant vécu une situation d’itinérance;
  5. l’élaboration d’un système d’accès coordonné qui utilise des outils d’évaluation communsNote de bas de page 8, afin d’établir l’ordre de priorité des clients et de les jumeler avec le logement et le soutien disponibles;
  6. un processus de gestion du rendement et d’assurance de la qualité, afin de surveiller et d’améliorer la mise en œuvre du plan et le rendement des programmes financés;
  7. la cartographie du système désignant les logements et les services actuels et l’identification des lacunes;
  8. l’intégration de plans propres à une population donnée, y compris des stratégies visant à prévenir et à réduire l’itinérance chez les jeunes, les peuples autochtones, les personnes qui s’identifient comme LGBTQ2 et les personnes ayant une incapacité;
  9. un processus permettant d’intégrer le système aux systèmes municipaux, provinciaux, territoriaux ou fédéraux traditionnels avec une attention particulière aux personnes qui sortent des établissements de soins ou de détention (par exemple, foyer d’accueil, prison, hôpital).

Selon ce modèle, le gouvernement fédéral financerait et soutiendrait les collectivités désignées, afin d’obtenir des résultats liés à la réduction de l’itinérance au niveau communautaire, au lieu de mettre l’accent sur des investissements de programmes communautaires individuels. Le plan communautaire devient le plan du système communautaire, afin d’obtenir ces résultats.

Cette approche modifie considérablement les rôles et les responsabilités dans les collectivités désignées. Le rôle des entités communautaires et des conseils consultatifs communautaires sera redéfini afin d’assurer un rôle plus important de leadership, en particulier pour la gestion du rendement, l’amélioration et l’assurance de la qualité, la planification du système, la collecte et l’analyse de données ainsi que la présentation régulière de rapports. L’expérience au Canada et aux États-Unis a montré qu’un leadership fort, actif et axé sur les résultats est un facteur crucial de réussite dans la prévention et la réduction de l’itinérance.

Le Comité a noté des inquiétudes dans le pays, à propos de l’interprétation non uniforme des directives de la Stratégies des partenariats de lutte contre l’itinérance et des exigences de la mise en œuvre de Logement d’abord, par l’entremise de Service Canada. En plus d’une nouvelle insistance sur les résultats de l’itinérance à l’échelle communautaire, le gouvernement devrait examiner si une relation directe de supervision et de soutien serait plus efficace et efficiente entre la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance et les collectivités désignées, et si l’aide de Service Canada est nécessaire.

Recommendations

3.1 On reconnaît et comprend que le financement du programme au Québec est alloué selon une entente séparée et négociée avec le gouvernement du Québec. Bien que les recommandations dans le présent rapport aient été élaborées en collaboration avec des intervenants de la province, les seuils de financement et les politiques stratégiques spécifiques devront respecter ce processus, avant son application par les agences et organismes du Québec.

3.2 La Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance doit être restructurée pour aider les collectivités à créer des systèmes locaux coordonnés de lutte contre l’itinérance fondés sur des données et axés sur la prévention et la réduction de l’itinérance dans l’objectif d’y mettre fin. Le programme devrait être révisé sur une base régulière par la suite.

3.3 La Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance consulte les entités communautaires et les conseils consultatifs communautaires, puis met sur pied un comité consultatif d’experts, aux fins suivantes :

  • soutenir le développement d’un modèle de planification de système communautaire, afin de remplacer le plan communautaire;
  • aider à définir les rôles, les responsabilités et les redditions de compte requis pour la mise en œuvre du modèle de planification de système communautaire;
  • conseiller sur les rôles et les responsabilités futures de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance et Service Canada.

3.4 Le gouvernement demande un plan de transition de la part des collectivités avant 2019, afin de donner jusqu’à l'exercice financier 2021 à 2022 pour mettre en place les systèmes coordonnés. Les mécanismes d’établissement de rapports, y compris les rapports sur les résultats, seraient mis en place progressivement et de manière coordonnée. Le plan devrait être élaboré avec la participation pleine et entière des gens qui ont une expérience vécue de l’itinérance.

3.5 La Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance doit offrir de l’entraînement et de l’aide technique pour appuyer les collectivités tout au long de la transition.

3.6 Le financement des entités communautaires doit être augmenté pour qu’elles puissent jouer un rôle de leadership plus grand et comprenant des expériences vécues, pour appuyer la collecte et l’analyse de données locales ainsi que financer les aspects clés de l’intégration du système comme les systèmes d’accès coordonnés.

3.7 La Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance apporte un soutien à l’intégration ou le lien avec d’autres systèmes autochtones, municipaux, provinciaux ou fédéraux (par exemple la santé, les services correctionnels, le bien-être de l’enfance).

4. Élaboration d’une stratégie nationale de données

Dans le cadre d’une approche systémique visant à prévenir et à réduire l’itinérance, les données et les systèmes de données jouent un rôle central dans la coordination du système axé sur l’itinérance locale, la planification, la gestion du rendement et l’amélioration de la qualité. À l’échelle nationale, le gouvernement a besoin d’avoir accès à des données de grande qualité provenant des collectivités, grâce à des infrastructures de données appropriées mises en place pour collecter, sécuriser, analyser et partager l’information, afin d’assurer le progrès de ses objectifs en matière d’itinérance. Cela inclut travailler avec le secteur de la violence contre les femmes, afin de recueillir des statistiques et de créer un portrait plus complet de l’itinérance. Il s’agit d’un changement important par rapport à l’approche actuelle de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance en matière de collecte et d’utilisation des données.

Discussion

L’expérience du Canada et des États-Unis montre à quel point il est important de connaître, en temps réel, toutes les personnes en situation d’itinérance dans une collectivité. Ces données de suivi propres aux personnes sont essentielles pour cibler et prioriser efficacement les interventions, comprendre le fonctionnement du système de lutte contre l’itinérance, cibler les efforts de prévention et mesurer les progrès par rapport à l’objectif de réduction de l’itinérance chronique. Il s’agit d’un changement important par rapport à l’approche actuelle de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance en matière de collecte et d’utilisation des données.

Aujourd’hui, la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance collecte des données et de l’information sur l’itinérance grâce à 4 sources principales :

  1. Les données sur l'utilisation de refuges, provenant des fournisseurs de services, y compris ceux qui utilisent le Système d'information sur les personnes et les familles sans abri (SISA), qui est élaboré et appuyé par la Stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance.
  2. Les dénombrements ponctuels et les enquêtes sur l'itinérance dans les refuges d'urgence, à l'extérieur et dans d'autres endroits, effectués dans 32 collectivités en 2016 et prévus pour plus de 60 collectivités en 2018.
  3. La liste nationale des fournisseurs de services, un répertoire national continuellement mis à jour des fournisseurs de services de lutte contre l'itinérance, y compris des renseignements sur le type de services et les populations desservies.
  4. Les rapports sur les résultats des projets financés par la Stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance, y compris les résultats des projets et les populations desservies.

La version la plus récente du SISA (SISA4) peut potentiellement répondre aux besoins technologiques des collectivités qui passent à une approche systémique, ce qui donne aux collectivités visées par la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance un bon départ technologique. Elle ouvre également la voie à l’établissement d’un portrait national complet de l’itinérance et des besoins en matière de logement au Canada, tout en brossant un tableau en temps réel des progrès réalisés par chacune des collectivités dans la réduction de l’itinérance chronique et épisodique.

Recommendations

4.1 La Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance conçoit une nouvelle stratégie nationale de données, afin de mettre en place une évaluation nationale exhaustive de l’itinérance au Canada et d’appuyer le passage à des systèmes locaux de lutte contre l’itinérance fondés sur des données, qui comprennent :

  • s'informer auprès des personnes ayant une expérience vécue et des expertises en itinérance au cours du développement de la stratégie nationale de données et de la mise en œuvre des systèmes de données locaux;
  • inclure la protection des droits et de la vie privée des personnes est comprise dans la conception et la mise en œuvre de la stratégie nationale de données;
  • la collecte de données en temps réel sur toutes les personnes en situation d'itinérance au Canada, dont les femmes victimes de violence qui vivent dans des refuges et d'autres logements temporaires;
  • fournir aux collectivités les moyens de faire le suivi des résultats au niveau du système et d'en rendre compte (par exemple, la durée du séjour dans un refuge, le passage à l'itinérance, le nombre de personnes sans logis, les sorties de l'itinérance et les retours à celle-ci);
  • développer un moyen de garantir la transparence et le compte rendu public des statistiques sur l'itinérance et des résultats; la mise en œuvre des systèmes d'information sur la gestion de l'itinérance dans les collectivités (comme le SISA), pour harmoniser la collecte de données, la production de rapports publics, l'accueil, l'évaluation et les aiguillages afin d'assurer la prestation coordonnée des services;
  • l'amélioration de la collecte des données devrait accorder la priorité aux jeunes et aux personnes en situation d'itinérance chronique et viser à créer des données qui révèlent les interactions du système public contribuant à la lutte contre l'itinérance chez les jeunes (par exemple le dépassement de la limite d'âge dans les régimes d'aide aux enfants);
  • voir à ce qu'Emploi et Développement social Canada ait la capacité de fournir une évaluation nationale continue et complète de l'itinérance au Canada, y compris la présentation de rapports publics en temps réel et relatifs aux données sur l'itinérance à l'échelle communautaire.

5. Logement d’abordNote de bas de page 9

Le renouvellement de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance en 2014 a marqué un changement important pour le gouvernement fédéral, en faisant de Logement d’abord une priorité en matière de politiques et de financement. Logement d’abord est défini comme « une approche axée sur le rétablissement pour mettre fin à l’itinérance qui consiste à placer le plus rapidement possible les personnes en situation d’itinérance dans des logements indépendants et permanents, sans condition préalable, pour ensuite leur fournir des soutiens et services supplémentaires au besoin ».Note de bas de page 10

La philosophie et l’approche Logement d’abord bénéficie d’un large soutien et connaît une croissance de mise en œuvre réussie partout au Canada. Logement d’abord continu d’être essentiel à la prévention et à la réduction de l’itinérance. Au cours des 3 dernières années, nous avons beaucoup appris grâce à la mise en œuvre au niveau national, mais le Comité a cerné plusieurs aspects à améliorer.

Discussion

Au cours du renouvellement de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance en 2014, le programme a établi des objectifs d’investissement pour les volets Collectivités désignées et Itinérance chez les Autochtones dans des collectivités d’une certaine taille, et les a mis en œuvre progressivement sur une certaine période. La Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance a également veillé en priorité à ce que cet investissement cible les personnes qui, souvent en raison d’affections incapacitantes, sont en situation d’itinérance chronique (tel que défini par la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance, des personnes qui sont actuellement sans abri et qui l’ont été pendant 6 mois ou plus au cours de la dernière année) ou en situation d’itinérance épisodique (des personnes qui sont actuellement sans abri et qui ont connu au moins 3 épisodesNote de bas de page 11 d’itinérance au cours de la dernière année).

Le Comité a également discuté de l’affectation des fonds et a convenu que le maintien des objectifs actuels de Logement d’abord était raisonnable pour permettre aux collectivités de réaliser des progrès vers l’élimination de l’itinérance.

Emploi et Développement social Canada et le Comité ont entendu les préoccupations des principaux intervenants, notamment des entités communautaires, au sujet des conditions imposées au modèle Logement d’abord dans le contexte de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance. Plus précisément, certains intervenants estiment que les exigences de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance restreignent la possibilité pour les collectivités d’investir dans leurs priorités locales et craignent que la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance accorde priorité aux personnes en situation d’itinérance chronique et épisodique au détriment d’autres sous-groupes vulnérables (par exemple les jeunes et les femmes fuyant la violence). D’autres ont signalé la difficulté d’atteindre les objectifs d’investissement de Logement d’abord, en partie en raison de la disponibilité de logements abordables ou encore de la difficulté à adapter Logement d’abord au contexte local, compte tenu des restrictions sur les dépenses admissibles.

Établissement des priorités

La mise en œuvre des investissements de Logement d’abord pour les personnes en situation d’itinérance chronique a été placée en priorité par la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance. La Stratégie nationale sur le logement poursuit cette priorisation et s’engage à réduire de 50 % la population en situation d’itinérance chronique d’ici l'exercice financier 2027 à 2028. Cette cible signifie que les individus doivent être en situation d’itinérance durant plus de 7 mois au courant d’une année ou vivre plusieurs épisodes d’itinérance avant d’être admissibles aux fonds de Logement d’abord. La priorisation de la Stratégie nationale sur le logement semble restreindre davantage cette cible aux utilisateurs de refuges d’urgence. Le Comité convient que l’établissement d’un tel ordre de priorité est essentiel, mais il souligne que cette politique a pour conséquence non intentionnelle que les personnes dont les besoins sont très complexes pourraient être laissées dans l’itinérance jusqu’à ce qu’elles satisfassent au critère chronologique. Cela signifie invariablement que leur santé physique, leur santé mentale et d’autres troubles se détériorent davantage. En outre, l’ordre de priorité de la Stratégie nationale sur le logement pour l’itinérance chronique exclus les femmes, les jeunes et les personnes LGBTQ2 à l’accès de la majorité des fonds de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance PLI, car un bon nombre de ces personnes éviteront ou n’auront pas accès aux refuges d’urgence.

De plus, il est important de noter que, pour réduire l’itinérance chronique au Canada, les collectivités devront réduire le nombre de personnes qui passent à une situation d’itinérance chronique. Le passage à une situation d’itinérance chronique est dans la majorité des cas lié au fait que les personnes sans abri ayant des besoins complexes se retrouvent en situation d’itinérance chronique avec l’âge, souvent avec des besoins criants qui auraient été moindres si une intervention avait eu lieu plus tôt.

L’une des réponses à ces préoccupations est de modifier l’ordre de priorité des investissements de Logement d’abord afin d’inclure les personnes sans abri qui sont jugés présenter une situation de vulnérabilité et un niveau d’urgence élevé (par exemple, qui ont des besoins complexes et qui risquent de mourir de l’itinérance). Ce niveau d’urgence peut être évalué au moyen de plusieurs outils d’évaluation fondés sur des données probantes. La Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance, en collaboration avec les entités communautaires, devrait assurer une approche nationale cohérente en matière d’évaluation des vulnérabilités en examinant et en approuvant les outils disponibles aux fins des programmes financés par la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance. Les nouveaux outils devraient être revus régulièrement et s’appuyer sur les dynamiques propres aux populations, en particulier en ce qui concerne les populations autochtones, les jeunes et les femmes.

Adaptation de Logement d’abord

L’une des leçons clés de la mise en œuvre de Logement d’abord est que cette approche doit être adaptée pour répondre aux conditions locales (par exemple le financement, la taille de la collectivité, le type et disponibilité des logements au niveau local) et aux besoins uniques des différentes populations (par exemple, les femmes, les jeunes, les Autochtones, les anciens combattants). Le modèle Logement d’abord se prête bien à une adaptation rapide, mais les directives actuelles de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance limitent toute adaptation.

Le Comité ajoute qu’aux fins de l’adaptation de Logement d’abord, il faut veiller à demeurer fidèle aux éléments fondamentaux du modèle et à offrir un soutien aux collectivités tout au long du processus de mise en œuvre.

Le Comité fait remarquer que l’on procède à l’heure actuelle, dans le cadre de projets financés par la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance, en collaboration avec l’Alliance canadienne pour mettre fin à l’itinérance, Vers un chez soi Canada et l’Observatoire canadien sur l’itinérance, à la conception de trousses d’outils qui orienteront les adaptations en fonction des populations.

Recommendations

5.1 Maintenir l’affectation des fonds et les objectifs actuels de Logement d’abord pour permettre aux collectivités de mettre fin à l’itinérance (65 % pourraient être atteints grâce à de multiples sources de financement).

5.2 Maintenir l’ordre de priorité des investissements de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance pour les personnes sans abri de façon chronique et épisodique, mais modifier l’ordre de priorité pour inclure les personnes sans abri qui sont évaluées comme étant en une situation de vulnérabilité et sévère (par exemple, représentant des problèmes plus complexes qui ont un impact sur la santé globale et la stabilité du logement).

5.3 Modifier l’objectif de la Stratégie nationale sur le logement et de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance afin de réduire de 50 % l’itinérance chronique et l’itinérance sévère, conformément à une définition nationale plus inclusive de l’itinérance.

5.4 Élaborer des critères en vertu desquels les collectivités désignées pourraient réaffecter des cibles d’investissement de Logement d’abord à des investissements dans la prévention et la réduction de l’itinérance chronique (par exemple, pour combler une lacune dans le financement provincial, pour créer un programme axé sur la prévention ou la population et ciblant l’itinérance chronique ou une réaffectation du financement une fois l’itinérance chronique fonctionnelle nulle atteinte).

5.5 Élaborer des lignes directrices nationales et un processus d’agrément afin d’assurer une mise en œuvre de haute qualité du programme Logement d’abord qui respecte et reconnaît l’entente distincte avec le QuébecNote de bas de page 12.

5.6 La Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance procède à un examen de ses directives sur l’approche Logement d’abord, en consultation avec les entités communautaires, les conseils consultatifs communautaires, les experts, les personnes qui ont une expérience vécue de l’itinérance et les programmes Logement d’abord, afin d’éliminer les obstacles à l’adaptation de Logement d’abord aux conditions locales et aux populations sans abri. Cet examen devrait également comprendre un examen des mesures de soutien au logement qui favorisent le maintien des logements à l’extérieur d’un programme Logement d’abord.

5.7 La Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance, en consultation avec les entités communautaires, devrait assurer une approche nationale cohérente pour l’évaluation des vulnérabilités, en examinant et en approuvant les outils disponibles aux fins des programmes financés par la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance. Les nouveaux outils devraient être revus régulièrement et s’appuyer sur les dynamiques propres aux populations, en particulier en ce qui concerne les populations autochtones, les jeunes et les femmes.

6. Hausser le nombre de collectivités désignées visées par la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance

L’élargissement et le prolongement du financement de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance, ce qui a fait l’annonce dans le budget de 2017, offrent l’occasion de hausser le nombre de collectivités désignées afin de répondre aux besoins des collectivités qui, à l’heure actuelle, ne sont pas financées ou encore ne le sont pas suffisamment par rapport aux besoins locaux.

Discussion

Depuis 1999, les investissements du gouvernement du Canada ont visé 61 communautés désignées à l’échelle du pays. Afin de déterminer quelles nouvelles collectivités pourraient être ajoutées dans la hausse du nombre des collectivités de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance, on a, dans un premier temps, obtenu des données de recensement de Statistique Canada ayant trait à des collectivités de plus de 30 000 habitants qui ne touchent actuellement aucun financement sous le régime de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance. Ces collectivités ont été étudiées à partir d’un ensemble d’indicateurs clés (par exemple, taille de la population, la population autochtone, la capacité d’hébergement, le taux de chômage, le taux d’inoccupation et existence de besoins impérieux en matière de logement) par rapport aux communautés désignées actuelles. De plus, chacune de ces collectivités a été scrutée au moyen d’une revue des médias, des sites Web municipaux et des rapports communautaires dans le but de bien saisir le profil public de l’itinérance et les mesures qui sont prises à cet égard.

La prolongation du financement de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance à de nouvelles communautés désignées a été soutenue par le Comité, mais ce dernier veut s’assurer que l’ajout de nouvelles collectivités désignées ne se fasse pas au détriment des collectivités existantes, et que les critères pour l’ajout de nouvelles communautés désignées soient fondés sur une méthodologie plus transparente et rigoureuse, avec des données qui démontrent clairement le besoin (par exemple, les dénombrements ponctuels).

Le Comité remarque aussi que la durée du renouvellement de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance crée des occasions d’harmonisation des niveaux de financement et d’ajout de nouvelles collectivités, au fur et à mesure que les besoins changent au cours de la décennie de ce renouvellement. Cependant, le défi que pose ce scénario est que les collectivités ne devraient pas être pénalisées pour le succès dans la réduction de l’itinérance en perdant du financement de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance lorsque l’itinérance est réduite. Pour que le succès soit durable, il faudra des investissements continu.

Recommendations

6.1 Le Comité appuie l’ajout de nouvelles communautés désignées, mais souligne que les nouveaux budgets ne devraient pas être alloués aux dépens des collectivités existantes. Ces collectivités devraient être ajoutées en fonction des besoins démontrés, en utilisant un processus ouvert et transparent. Le Comité recommande qu’Emploi et Développement social Canada organise un processus concurrentiel en 2 étapes basé sur le financement disponible à toute collectivitéNote de bas de page 13 :

  • La première étape du processus serait une invitation ouverte à une expression d’intérêt. Les collectivités qui répondent à cette invitation devront décrire les besoins (analyse de l’itinérance dans la collectivité) et être prêtes à devenir une collectivité désignée (par exemple, avoir un chef de collectivité reconnu, et des indications de soutien de la province, du système de santé, du gouvernement municipal, des autorités en matière de logement, des fournisseurs de soins de santé mentale et d’autres intervenants clés).
  • La deuxième étape serait une invitation à soumettre une demande complète envoyée à une liste restreinte de collectivités soumises au processus d’expression d’intérêt. Cette demande communautaire, élaborée avec le soutien financier d’Emploi et Développement social Canada, nécessiterait un dénombrement précis des personnes en situation d’itinérance (avec dénombrement ponctuel, semaine d’enregistrement, compte de la prévalence des périodes ou autre méthode approuvée) et l’élaboration d’un plan communautaire pour prévenir et réduire l’itinérance chronique.

6.2 Emploi et Développement social Canada met au point un processus pour surveiller l’évolution des besoins des collectivités et ajuster le financement avec le temps.

7. Répondre aux besoins des sous-populations à risque d’itinérance

7.1 Lutter contre l’itinérance chez les Autochtones

Les Autochtones sont nettement surreprésentés dans les personnes en situation d’itinérance du Canada découlant de la colonisation. Ce problème devrait se refléter dans le financement et les politiques de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance.

Discussion

Selon l’Étude nationale sur les refuges, on estime qu’entre 38 080 et 45 820 Autochtones ont utilisé des refuges en 2014. Dans l’ensemble, les statistiques indiquent que le taux d’utilisation des refuges par les Autochtones est 10 fois plus élevé que celui des non-autochtones. Comparativement aux taux d’utilisation des refuges par les non-autochtones, celui des Autochtones aînés est 20 fois plus élevé et celui des Autochtones adultes est 13 fois plus élevé. De ce nombre, 32 % des clients autochtones étaient des femmes comparativement à 23,5 % des clients non autochtones.Note de bas de page 14

Le pourcentage d’utilisateurs de refuge qui déclarent une ascendance autochtone variait considérablement selon la collectivité, passant de moins de 5 % dans certaines collectivités suburbaines à plus de 90 % dans de nombreuses collectivités du Nord. Dans chacune des communautés où des données sont disponibles, les Autochtones sont surreprésentés dans les refuges comparativement à leur pourcentage dans la population en général.Note de bas de page 15 Étant donné que l’Étude nationale sur les refuges n’incluait que les refuges d’urgence dans les réseaux de sans-abri, il s’agit certainement d’une sous-estimation de l’itinérance autochtone au Canada.

Les membres du Comité ont discuté des circonstances uniques et difficiles auxquelles font face les peuples autochtones et de leur importante surreprésentation au sein de la population des sans-abri. Les membres étaient fermement convaincus que la voie à suivre pour le programme devrait être guidée par les appels à l’action de la Commission de vérité et de réconciliation, ainsi que par la relation de nation à nation, Inuit-Couronne et de gouvernement à gouvernement que le gouvernement du Canada s’est engagé à entretenir avec les Premières nations, les Inuits et les Métis. Le Comité a été informé que des discussions avec les Premières nations, les Inuits et les Métis sur les mesures de soutien de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance étaient en cours.

Bien que les mesures contenues dans le présent rapport final aideront à réduire l’itinérance chez les peuples autochtones (par exemple, une définition nationale de l’itinérance, la personnalisation du programme Logement d’abord, le recentrage des priorités pour le financement de Logement d’abord, la prévention, un financement accru pour les territoires), le Comité a estimé que le financement actuellement affecté à la lutte contre l’itinérance autochtone était insuffisant et que le Comité devait poursuivre les discussions sur l’itinérance autochtone.

Recommendations

7.1.1 Le Comité recommande qu’Emploi et Développement social Canada établisse un comité consultatif de fournisseurs de services autochtones, de personnes ayant vécu l’itinérance et d’experts des secteurs de compétence afin de transmettre régulièrement aux responsables du programme des commentaires et des conseils.

7.1.2 Le Comité recommande l’utilisation de la définition de l’itinérance chez les Autochtones de l’Observatoire canadien sur l’itinérance dans la conception et la livraison du programme.Note de bas de page 16

7.1.3 Le Comité recommande que le volet de financement autochtone soit augmenté, qu’il soit géré, élaboré et livré par des Autochtones, et qu’une perspective sur les sexes soit mise en application lors de ce processus.

7.1.4 Le Comité recommande que toutes les directives de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance soient examinées sous l’angle culturel autochtone et que les programmes de formation et de renforcement des capacités culturelles dirigés et conçus par des Autochtones soient considérés comme un élément clé des accords de financement pour tous les autres volets de financement.

7.1.5 Tous les groupes non autochtones ont la responsabilité d’assurer la compétence culturelle des organismes au service des peuples autochtones.

7.2 Lutter contre l’itinérance chez les femmes

Le Comité estime que la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance, comme elle est actuellement structurée, ne répond pas adéquatement aux besoins uniques des femmes en situation d’itinérance. De plus, les changements au programme qui donnaient la priorité à l’itinérance chronique et épisodique empêchaient non intentionnellement de nombreuses femmes de bénéficier des fonds de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance.

Discussion

Les femmes ne vivent pas l’itinérance et l’instabilité du logement de la même façon que les hommes. De nombreux facteurs rendent les femmes vulnérables et susceptibles de vivre des situations d’itinérance, notamment la violence familiale, les abus sexuels, la toxicomanie et les troubles de santé mentale et de santé physique. Le dénombrement ponctuel coordonné de 2016 a révélé que 39 % des répondants en situation d’itinérance s’auto-identifient comme étant des femmes. D’après les résultats de l’Étude nationale sur les refuges de 2004 à 2015, 27,3 % des utilisateurs des refuges sont des femmes. Ces données constituent presque certainement une sous-estimation de l’itinérance chez les femmes au Canada. Certaines femmes peuvent choisir les services aux sans-abri en dernier recours après avoir épuisé toutes les autres options, mais ne sont pas incluses dans les statistiques sur les sans-abri.

Les résultats de l’Étude nationale sur les refuges en 2016 montrent que l’augmentation de la durée des séjours dans des refuges est particulièrement évidente parmi les familles dirigées par des femmes célibataires, dont les durées de séjour ont plus que doublé entre 2005 et 2014 pour atteindre 22 jours, ayant pour résultat un taux d’occupation élevé dans les refuges destinés aux familles. Le taux d’occupation moyen des refuges destinés aux familles affichait 86,3 % en 2014, soit une hausse considérable par rapport au taux de 2005, qui se situait à 67,3 %.

Incapables d’obtenir un logement temporaire ou permanent pour échapper à la violence, de nombreuses femmes se retrouvent dans un cycle de violence continu. Elles se retrouvent souvent dans la rue où elles sont extrêmement vulnérables aux dommages physiques, émotionnels et psychologiques. L’itinérance expose les femmes à un risque accru de violence sexuelle, d’exploitation et de traite des personnes. Par exemple, elles peuvent être forcées d’offrir des services sexuels contre un logement temporaire, ou de rester dans des édifices abandonnés dangereux et des logements surpeuplés. Beaucoup de femmes éviteront d’accéder à des services de soutien dans la crainte de se faire enlever leurs enfants par les systèmes de protection de l’enfance et elles éviteront les refuges mixtes pour des raisons de sécurité.

Il est également important de noter que les systèmes traditionnels de lutte contre l’itinérance, ainsi que la plupart des programmes Logement d’abord, sont conçus pour répondre aux besoins des hommes, qui constituent la majorité des clients.

Ces problèmes sont encore aggravés pour les femmes autochtones qui luttent contre d’autres problèmes liés au traumatisme intergénérationnel et au racisme.

Le Comité estime que la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance, comme elle est actuellement structurée, ne répond pas adéquatement aux besoins uniques des femmes en situation d’itinérance, vu que les femmes dans cette situation sont souvent considérées comme n’étant pas sans abri pour ce qui est de l’accès aux fonds de Logement d’abord de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance.

L’absence d’une définition convenue de l’itinérance crée un désavantage critique pour l’accès aux fonds de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance pour les femmes. Comme on l’a vu, les femmes peuvent éviter les systèmes traditionnels de lutte contre l’itinérance, peuvent faire partie des « personnes en situation d’itinérance cachée » personnes hébergées provisoirement ou avoir accès à d’autres systèmes tels que les refuges pour femmes victimes de violence. Dans de nombreuses collectivités, les femmes en situation d’itinérance ne sont pas considérées comme des personnes sans abri parce qu’elles n’ont pas accès au système d’itinérance traditionnel (comme les refuges d’urgence). La priorisation de l’itinérance chronique empêche non intentionnellement de nombreuses femmes de bénéficier des fonds de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance parce que les personnes en situation d’itinérance chronique sont considérées comme des utilisateurs de refuges d’urgence en situation d’itinérance chronique (où les femmes sont souvent sous-représentées), et des personnes en situation d’itinérance chronique (beaucoup de femmes en situation d’itinérance sont accompagnées d’enfants), et ne tient pas compte des situations de vulnérabilité et du niveau d’urgence élevé auxquels sont souvent aux prises les femmes en situation d’itinérance.

Le Comité applaudit l’Analyse gouvernementale comparative entre les sexes plus (ACS+) de la Stratégie nationale sur le logement, et la mise en place d’une cible de 25 % de toutes les ressources de la Stratégie nationale sur le logement consacrées à la création de logements pour les femmes. Toutefois, comme nous l’avons abordé précédemment, le gouvernement a perpétué non intentionnellement le désavantage des femmes en situation d’itinérance, en ciblant notamment une réduction de 50 % de la population en situation d’itinérance chronique, dont la majorité sont des hommes. À moins que l’expérience unique des femmes en situation d’itinérance ne soit explicitement reconnue et incluse, les femmes en situation d’itinérance continueront d’être exclues des investissements de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance. Le Comité appuie également fortement l’ajout de l’allocation canadienne d’aide au logement dans la Stratégie nationale sur le logement. Comme l’a noté la Stratégie nationale sur le logement, « 55 % des ménages canadiens ayant des besoins impérieux en matière de logement […] sont dirigés par des femmes »Note de bas de page 17. L’allocation canadienne d’aide au logement pourrait être un programme de prévention de l’itinérance d’une grande importance pour les femmes confrontées à des besoins impérieux en matière de logement, à l’instabilité du logement et à l’itinérance. Il sera extrêmement important que l’allocation canadienne d’aide au logement donne la priorité à ceux qui en ont le plus besoin, en particulier les ménages qui ont des besoins impérieux en matière de logement (qui sont dirigés de façon disproportionnée par des femmes) et les personnes en situation d’itinérance.

Recommendations

7.2.1 Le Comité recommande que toute définition de l’itinérance adoptée par la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance reflète les expériences uniques des femmes, y compris l’inclusion spécifique des femmes en situation d’itinérance qui fuient la violence.

7.2.2 Les normes nationales et l’accréditation pour Logement d’abord devraient inclure l’adaptation du modèle de Logement d’abord de façon à pouvoir répondre aux besoins uniques des femmes.

7.2.3 Les collectivités qui adoptent une approche systémique coordonnée pour mettre fin à l’itinérance devraient inclure les organismes qui fournissent des services aux femmes et qui reflètent la façon dont les femmes vivent l’itinérance.

7.2.4 Dans le cadre de l’élaboration d’une approche nationale cohérente en matière d’évaluation de la vulnérabilité, tous les outils nouveaux et existants devraient être analysés pour s’assurer que les besoins uniques des femmes en situation d’itinérance sont évalués avec précision.

7.2.5 Une stratégie nationale sur les données de lutte contre l’itinérance devrait inclure des refuges de violence faite aux femmes et prendre bien soin de comprendre comment les femmes vivent l’itinérance et l’instabilité du logement afin de s’assurer que leur itinérance et leur instabilité sont bien prises en compte dans les analyses locales et nationales.

7.2.6 Dans la Stratégie nationale sur le logement, le langage qui fixe une réduction de 50 % du nombre d’usagers des refuges pour sans-abri chroniques est formulé de telle sorte qu’il est explicitement discriminatoire envers les femmes en raison de la façon dont elles vivent l’itinérance et du fait qu’elles ont moins souvent recours aux refuges. Le Comité recommande que le gouvernement du Canada révise et peaufine ce langage.

7.3 Lutter contre l’itinérance chez les jeunes

L’itinérance chez les jeunes est un sujet de préoccupation particulièrement important pour le Comité, qui a noté l’extrême vulnérabilité de ces jeunes et le niveau élevé de risque auquel ils sont confrontés. La lutte contre l’itinérance chez les jeunes sera un élément important pour prévenir et réduire l’itinérance chronique et épisodique.

« L’itinérance chez les jeunes » désigne la situation et l’expérience des jeunes âgés de 13 à 24 ans qui vivent indépendamment de leurs parents ou de leurs tuteurs, mais qui n’ont pas les moyens ni la capacité de vivre dans un logement stable, sûr ou continu.Note de bas de page 18

Discussion

Les membres du Comité soulignent les éléments suivants :

  • la recherche canadienne récente révèle que les jeunes sans abri ont des niveaux de besoins très aigus (ce qui signifie que s’ils étaient logés, ils allaient avoir besoin de soins psychiatriques se situant entre les soins aux patients hospitalisés et les soins aux patients en consultation externe), et bon nombre d’entre eux ont leur première expérience d’itinérance à un très jeune âge;
  • comparativement au grand public (Statistique Canada, 2011), les jeunes en situation d’itinérance sont 193 fois plus susceptibles d’avoir été impliqués dans le système de protection de l’enfance par rapport au grand public;Note de bas de page 19
  • les jeunes sans abri risquent d'avoir des problèmes de santé mentale, d'être exploités à des fins sexuelles et d'être victimes de crimes, et présentent déjà une mesure élevée de chronicité et de vulnérabilité;
  • les jeunes qui sortent des systèmes publics, y compris les services de protection de l'enfance, les services correctionnels et les soins de santé en milieu hospitalier ou en santé mentale, sont particulièrement exposés à une situation d'itinérance et aux conséquences négatives qui en découlent;
  • l'homophobie et la transphobie sont des facteurs de l'itinérance chez les jeunes, entraînant une surreprésentation des jeunes LGBTQ2 dans la population en situation d'itinérance;
  • la prévention et la réduction de l'itinérance chez les jeunes seront essentielles à l'atteinte de l'objectif du ministre Duclos de réduire de 50 % l'itinérance chronique, car les jeunes sans abri d'aujourd'hui deviennent rapidement les adultes en situation d'itinérance chronique de demain;
  • les stratégies visant à réduire l'itinérance chez les jeunes sont semblables à celles qui sont proposées dans le présent rapport (par exemple la planification du système, la stratégie Logement d'abord, prévention), mais elles doivent être élaborées et mises en œuvre en fonction des besoins des adolescents et des jeunes adultes, et peuvent être intégrées au renouvellement de la Stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance, dont les grandes lignes sont exposées dans les présentes recommandations.

Même s’ils ont indiqué que les provinces ont compétence sur les systèmes qui ont une incidence sur l’itinérance chez les jeunes au Canada, les membres du Comité estiment que le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle de premier plan dans la priorisation de la prévention et de la réduction de l’itinérance chez les jeunes.

Recommendations

7.3.1 Soutenir les collectivités pour intégrer des stratégies de jeunesse ciblées et complètes dans la planification communautaire, d’une manière qui reflète la diversité de l’expérience vécue, notamment les jeunes Autochtones, les jeunes femmes et les jeunes LGBTQ2. Pour les collectivités qui ont un plan d’action pour les jeunes, assurer sa coordination avec le plan communautaire principal.

7.3.2 Soutenir le déploiement de modèles de programmes novateurs qui sont fondés sur les besoins des jeunes et qui favorisent une sortie rapide de l’itinérance (tel que Logement d’abord pour les jeunes, logements de transition adaptés aux jeunes), et peuvent inclure différents modèles d’accommodement.

7.3.3 Étant donné les différents risques associés à l’exposition à l’itinérance chez les jeunes, il faudrait mettre l’accent sur la prévention, une transition sûre et efficace de la protection de l’enfance à l’âge adulte, une amélioration des soutiens familiaux et naturels, une intervention précoce en milieu scolaire et un soutien axé sur le milieu comme les foyers d’accueil et Youth Reconnect.

7.3.4 Aider les collectivités à répondre de manière proactive aux besoins des jeunes de la communauté LGBTQ2 en utilisant les politiques, les programmes, la pratique et les formations.

7.3.5 Le ministre Duclos appuie la création d’un comité fédéral/provincial-territorial sur l’itinérance chez les jeunes. Ce comité consisterait en une tribune pour une meilleure harmonisation des politiques, du financement et la communication des pratiques exemplaires. Il serait également responsable de développer une stratégie pan-canadienne de lutte contre l’itinérance chez les jeunes. Il serait composé de cadres supérieurs chargés de portefeuilles ministériels assumant une responsabilité stratégique pour les jeunes, l’itinérance, la santé mentale et toxicomanie, la protection de l’enfance, la justice et l’éducation.

7.3.6 Accroître les connaissances et la collecte de données sur l’itinérance chez les jeunes.

7.3.7 Aider les collectivités à élaborer des systèmes d’admission coordonnés pour Logement d’abord qui répondent aux besoins spécifiques des jeunes. Le mélange des services aux jeunes et aux adultes, les processus d’admission et la prestation de programmes en commun avec les adultes constituent des situations qui créent des risques élevés pour les jeunes et qui devraient être évitées dans la mesure du possible.

8. Financement accru pour le Nord

Le nord du Canada (comme le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut) est aux prises avec des défis uniques en matière de logement et d’itinérance en raison de nombreux facteurs. Ces circonstances uniques méritent une attention particulière des besoins spécifiques de chaque territoire dans le cadre du renouvellement et le remaniement du programme de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance. Il est essentiel que le modèle communautaire dans les provinces soit reproduit dans les territoires. Le fait de ne compter que sur les gouvernements territoriaux ou municipaux pour la prestation des services crée des lacunes importantes, car les populations clés ne reçoivent pas de services en raison des limites aux domaines de compétence et des politiques en vigueur.

Discussion

Il existe des défis uniques en matière de logement et d’itinérance en raison de nombreux facteurs : le climat, la courte saison de construction, le manque de matériaux de construction facilement accessibles et les changements environnementaux qui font en sorte que le logement et l’infrastructure connexe sont extrêmement coûteux à construire et à entretenir dans le nord du Canada.

L’itinérance dans le Nord revêt souvent la forme d’une surpopulation et d’une itinérance cachée (par exemple les personnes qui ont recours à l’hospitalité temporaire comme le – couch surfing), ce qui rend difficile le dénombrement de la population des sans-abri. Dans de nombreuses collectivités, il y a pénurie de logements vacants, de sorte qu’il est difficile de mettre en œuvre le modèle Logement d’abord et de sortir les personnes sans abri de l’itinérance.

Le dénombrement ponctuel de 2015 à Yellowknife a révélé 139 personnes en situation d’itinérance, dont 91 % se sont identifiées comme étant des Autochtones. Le dénombrement ponctuel de 2015 à Whitehorse a révélé 219 personnes en situation d’itinérance, dont 78 % se sont identifiées comme étant des Autochtones. Au Nunavut, les dénombrements ponctuels de 2014 de l’Iqaluit, Cambridge Bay et Rankin Inlet ont estimé la population sans abri du territoire à environ 100 personnes, mais lorsque l’on tient compte de l’itinérance cachée, le total estimatif augmente sensiblement pour atteindre 1 200.Note de bas de page 20

Dans le cadre de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance, le financement régional est dispensé par l’entremise des volets de financement des collectivités désignées, de l’itinérance chez les Autochtones et des collectivités rurales et éloignées. Les 3 capitales territoriales, Whitehorse, Yellowknife et Iqaluit, sont les seules communautés désignées dans le Nord.

Recommendations

8.1 Le Comité recommande la création d’un volet de financement réservé au Nord, modélisé sur le volet Collectivités désignées, pour les 3 territoires, afin de mieux lutter contre l’itinérance dans ces régions. Le développement d’un volet de financement pour le Nord devrait être le fruit de consultations et de négociations avec les gouvernements territoriaux, municipaux et autochtones, et doit être géré par les Autochtones tout en adoptant une perspective axée sur les sexes.

9. Recentrer le financement national

Il y a un rôle important pour un volet de financement national réservé sous la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance, mais le financement pour les solutions novatrices à l’itinérance, tel qu’il est actuellement conçu, pose de nombreux défis.

Discussion

Le Comité appuie un volet de financement national comme un atout important pour le renforcement de la capacité et de l’innovation. Toutefois, dans sa forme actuelle, le volet Solutions novatrices à l’itinérance ne bénéficie pas d’un soutien généralisé des membres, étant donné qu’il existe plusieurs problèmes quant à la façon dont le financement est utilisé à l’heure actuelle. Les subventions modestes ne suffisent pas à stimuler l’innovation de manière significative ni ne sont, de manière générale, évolutives.

Le Comité a le sentiment que le volet de financement national pourrait être remanié afin d’avoir une incidence plus importante sur les objectifs de prévention et de réduction de l’itinérance du gouvernement.

Recommendations

9.1 Le volet de financement national devrait être maintenu à son niveau actuel d’affectation, ou bien accru. Toutefois, il devrait cibler des activités prioritaires telles que :

  • des subventions à l’innovation pour des projets de démonstration et des travaux de recherche visant spécifiquement à soutenir la prévention, la diminution de l’itinérance et les mesures d’adaptation de Logement d’abord;
  • le renforcement des capacités communautaires et transformation du secteur pour que les collectivités soient prêtes au renouvellement (par exemple la planification du système, accès coordonné et adaptation de Logement d’abord). Cela devrait comprendre une formation, une assistance technique et une mobilisation des connaissances. Les activités de mobilisation des connaissances peuvent inclure des innovations qui sont nouvelles dans une administration, mais qui peuvent être utilisées ailleurs;
  • des investissements dans des projets qui renforcent la capacité des personnes qui ont une expérience vécue de l’itinérance à participer aux activités d’élaboration de politiques et de programmes;
  • le développement d’une stratégie nationale de données pour mettre en œuvre le SISA.

10. Prévention

Pour réaliser les objectifs du gouvernement fédéral en matière d’itinérance, il est essentiel de réduire le nombre de personnes qui passent à l’itinérance et d’assurer une sortie réussie de l’itinérance.

Discussion

Le renouvellement de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance en 2014 a marqué un changement important dans la réponse du gouvernement fédéral canadien à l’itinérance. En effet, en raison de l’intégration de l’approche Logement d’abord au mandat et aux directives de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance, on a accordé plus d’attention et consacré plus de fonds à la transition des gens vers un logement permanent, en particulier ceux qui séjournent longtemps dans un refuge ou dans la rue, en offrant les soutiens nécessaires pour assurer la stabilité d’un logement à long terme. Il s’agit d’un pas important vers l’élimination de l’itinérance au Canada.

Il y a toutefois un vaste consensus selon lequel la réduction à long terme de l’itinérance au Canada nécessite une approche qui met l’accent à la fois sur la prévention et sur les moyens de se sortir de l’itinérance une fois pour toutes. Les politiques, les programmes et les investissements visant à réduire le nombre de personnes et de familles qui deviennent sans-abri chaque année (par exemple, qui aboutissent dans le système) sont aussi importants que les investissements faits dans les services qui aident déjà les personnes sans abri à se trouver un logement (pour les sortir du système).

Le Comité a dit estimer qu’il est important d’avoir une définition de la prévention de l’itinérance. Il a proposé que la prévention de l’itinérance comprenne des politiques, des pratiques et des interventions qui réduisent la probabilité qu’une personne soit en situation d’itinérance. Il s’agit également de fournir aux personnes sans abri les ressources et les soutiens nécessaires pour stabiliser leur logement, améliorer l’intégration et l’inclusion sociale et, au bout du compte, réduire le risque de récurrence de l’itinérance.Note de bas de page 21

Autrement dit, les investissements doivent mettre l’accent sur des initiatives axées sur le logement qui soit permettent aux personnes de conserver leur logement et d’éviter l’itinérance, soit viennent en aide aux personnes qui se sont sorties de l’itinérance en leur offrant les soutiens nécessaires pour prévenir un retour à l’itinérance. Les services et les soutiens offerts aux personnes dans un contexte d’urgence, par exemple l’aide offerte aux personnes afin d’améliorer leur santé, d’acquérir des aptitudes à la vie quotidienne, etc., peuvent être bénéfiques, mais ils ne peuvent pas être considérés comme des initiatives de prévention de l’itinérance. Le programme devrait continuer à mettre l’accent activement et directement sur le logement des personnes.

Le gouvernement fédéral peut renforcer l’adoption d’une définition commune et établir des directives claires (y compris des lignes directrices et des paramètres) sur ce que signifie la prévention de l’itinérance dans la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance en s’appuyant sur le travail de prévention de l’Observatoire canadien sur l’itinérance.

Recommendations

10.1 Réserver des subventions aux fins de projets de démonstration et de travaux de recherche visant expressément à appuyer la création d’une base de données pour la prévention de l’itinérance et l’adaptation de Logement d’abord pour prévenir l’itinérance (par exemple, Logement d’abord pour prévenir le passage des services correctionnels à l’itinérance). Ce processus devrait inclure l’implication de personnes qui ont une expérience vécue de l’itinérance.

10.2 Aider les collectivités à investir dans des initiatives admissibles qui s’alignent sur une définition claire de la prévention, comme celle qui figure dans le cadre de prévention de l’Observatoire canadien sur l’itinérance, qui aborde :

  1. les initiatives qui préconisent les approches et les interventions précoces (personnes à risque imminent d’itinérance);
  2. les initiatives visant à aider les personnes qui quittent les systèmes publics et qui présentent un risque imminent d’itinérance (protection de l’enfance, services correctionnels, soins de santé aux patients hospitalisés);
  3. les initiatives assorties d’activités de prévention des expulsions;
  4. les initiatives qui comportent des programmes de stabilisation du logement pour les personnes qui se sont sorties de l’itinérance;
  5. la promotion des droits pour les particuliers et les systèmes de soutien à la navigation des différents systèmes;
  6. l’amélioration du soutien familial et de l’aide naturelle pour garder les familles intactes et dans une situation de logement stable.

10.3 Rechercher des occasions de partenariat et de cofinancement de la prévention de l’itinérance. Étant donné que bon nombre des principaux moteurs de lutte à l’itinérance sont d’autres institutions publiques, il est possible de collaborer avec d’autres ministères fédéraux et d’autres paliers de gouvernement afin d’harmoniser les priorités et de réduire le nombre de personnes et de familles qui sombrent dans l’itinérance.

10.4 Soutenir la collecte de données personnelles en temps réel sur toutes les personnes en situation d’itinérance au Canada afin de donner aux collectivités et au gouvernement fédéral un portrait des arrivées dans l’itinérance et les données nécessaires pour cibler les interventions et les changements de politiques afin de prévenir l’itinérance.

11. Faire respecter le droit au logement pour les Canadiens en situation d’itinérance

Dans la Stratégie nationale sur le logement, le gouvernement a adopté une approche fondée sur les droits stipulant clairement que : « Les Canadiens ont droit à un logement sûr et abordable. Voilà pourquoi le gouvernement fédéral prend des mesures supplémentaires pour mettre en œuvre progressivement le droit de chaque Canadien d'accéder à un logement convenable »Note de bas de page 22. La Stratégie nationale sur le logement stipule également : « Notre plan est fondé sur les principes de l'inclusion, de la responsabilisation, de la participation et de la non-discrimination[; il] contribuera à l'atteinte des objectifs en matière de développement durable des Nations Unies, et il reconnaît le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ».Note de bas de page 23

Discussion

Dans un communiqué de presse suivant l’annonce de la Stratégie nationale sur le logement, Mme Leilani Farha, rapporteur spécial sur le logement convenable des Nations Unies, a affirmé que [traduction] « L’itinérance est la plus monumentale violation du droit au logement et des autres droits de la personne ». Mme Farha a indiqué que le Canada s’était joint à 192 autres états pour adopter les objectifs en matière de développement durable et un engagement à mettre fin à l’itinérance d’ici 2030, ce qui est conforme à l’objectif 11.

Dans le cadre d’une consultation subséquente, Mme Farha a donné le conseil suivant relativement au droit au logement et à l’obligation immédiate du Canada d’éliminer l’itinérance.Note de bas de page 24

Les stratégies en matière de logement fondées sur les droits […] doivent comprendre l’obligation de faire respecter progressivement le droit au logement convenable par tous les moyens appropriés et au maximum des ressources disponibles.

Les stratégies doivent dresser un plan par lequel le droit au logement sera respecté dans un délai raisonnable. Des dispositions sont nécessaires afin d’assurer non seulement les droits actuels (obligations immédiates), mais également les obligations axées sur l’action au fil du temps (obligations à réalisation progressive).

Puisqu’un État est considéré comme étant en violation du droit international des droits de la personne si une portion importante de la population est privée d’un abri de base ou de logement, aborder l’itinérance doit être une obligation immédiate. Les obligations immédiates comprennent également des garanties de non-discrimination en ce qui concerne le logement, la sécurité d’occupation, les exigences en matière de santé et de sécurité et les refuges d’urgence. D’autres obligations immédiates tiennent compte des ressources et d’autres facteurs, mais un État pourra uniquement utiliser le manque de ressources comme défense contre l’exécution d’une obligation immédiate s’il peut être démontré qu’il a déployé tous les efforts nécessaires pour utiliser toutes les ressources disponibles en vue de satisfaire l’obligation en priorité.

En ce qui concerne les normes de réalisation progressive indiquées dans l’Article 2(1) du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a déclaré dans son Commentaire général no 4 sur le droit au logement convenable que cela signifie que [traduction] « essentiellement, l’obligation consiste à faire la preuve que, dans l’ensemble, les mesures entreprises suffisent à exercer le droit pour chaque personne dans le délai le plus court possible et conformément au maximum des ressources disponibles ». Cette norme doit être mise en application afin d’établir les obligations qui sont réalisables dans le présent et celles pour lesquelles il faut attribuer une date ultérieure raisonnable. Les différences de capacité signifient qu’une obligation future dans certains États doit être reconnue comme une obligation immédiate pour d’autres.

Si le gouvernement du Canada planifie la réalisation progressive du droit au logement, s’il « reconnaît le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels » et s’il s’efforce de contribuer de manière significative aux objectifs en matière de développement durable des Nations Unies, alors il a l’obligation immédiate, en vertu du droit international, d’élaborer une stratégie visant l’élimination de l’itinérance, d’attribuer en priorité les ressources disponibles pour lutter contre l’itinérance et de prendre des mesures aussi rapidement que possible pour éliminer l’itinérance.

En plus de nos recommandations sur la future Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance, le gouvernement fédéral devrait entreprendre immédiatement 3 mesures visant l’élimination de l’itinérance et la réalisation du droit au logement pour les personnes en situation d’itinérance au Canada.

Engagement et plan pour éliminer l’itinérance

Les recommandations contenues dans le présent rapport comprennent plusieurs éléments fondamentaux d’un plan national visant à prévenir et mettre fin à l’itinérance (par exemple, une définition nationale de l’itinérance, un changement dans la planification du système communautaire, une stratégie de données nationales sur l’itinérance, un leadership en prévention de l’itinérance, la coordination des mesures fédérales) qui, combinés à la Stratégie nationale sur le logement, pourraient constituer un départ en force pour l’élimination de l’itinérance et le respect des obligations immédiates.

Le Comité croit que l’élément manquant est un engagement clairement défini, mesurable et assorti d’un délai précis de la part du gouvernement du Canada afin de prévenir l’itinérance et d’y mettre fin, en plus d’un plan pour réaliser cet objectif (dresser un plan selon lequel le droit au logement sera respecté dans un délai raisonnable) réunissant divers programmes et initiatives du gouvernement fédéral dans le cadre d’une stratégie complète. Cette stratégie constituerait :

  • une feuille de route pour une action fédérale coordonnée;
  • une base pour mieux cibler les investissements de la Stratégie nationale sur le de logement;
  • un véhicule pour la collaboration avec les provinces, les territoires, les gouvernements locaux et les dirigeants autochtones en ce qui concerne l’objectif de mettre fin à l’itinérance et la réalisation du droit au logement pour les personnes en situation d’itinérance au Canada.
Accorder la priorité aux investissements de la Stratégie nationale sur le logement

La Stratégie nationale sur le logement rétablit le leadership du gouvernement fédéral en matière de logement et investit 40 milliards de dollars dans le logement et la lutte à l’itinérance. Le Canada pourrait réaliser des réductions à grande échelle de l’itinérance au Canada si les investissements de la Stratégie nationale sur le logement sont mieux ciblés sur les personnes qui risquent de se retrouver itinérant.

Responsabilité d’aider

Les personnes en situation d’itinérance au Canada ont des interactions régulières et fréquentes avec les systèmes fédéral, provinciaux, territoriaux et municipaux. Ces systèmes peuvent souvent ne pas agir ou peuvent même causer l’itinérance d’une personne. Beaucoup trop de personnes tombent dans l’itinérance après avoir été libérées de systèmes gouvernementaux (par exemple la protection de l’enfance, les hôpitaux et les établissements correctionnels). Les expériences liées à l’itinérance peuvent également être un résultat direct de processus et de décisions d’organismes publics et de fournisseurs de logement provisoire financés par le gouvernement.

Ces systèmes existent dans tous les ordres de gouvernement, qui se partagent la compétence des obligations canadiennes en vertu du droit international. Les administrations fédérales, provinciales, territoriales, municipales et autochtones jouent toutes un rôle et ont compétence en ce qui a trait aux enjeux et aux systèmes qui contribuent grandement à l’itinérance, et elles ont la responsabilité de travailler au respect des obligations immédiates du Canada liées à l’itinérance.

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada crée d’abord pour lui-même un protocole de responsabilité d’aider. Il doit ensuite travailler avec les provinces, les territoires, ainsi que les administrations municipales et autochtones afin de créer et de mettre en œuvre un protocole de responsabilité d’aider pour les organismes publics. Cela comprend, sans toutefois s’y limiter : les forces armées, les organismes de protection de l’enfance, les établissements correctionnels, les services de police, les centres de détention de l’Immigration, et les hôpitaux. Le protocole serait inspiré des règlements en place pour les médecins, les policiers et les travailleurs sociaux qui observent de la violence domestique ou soupçonnent de la violence ou de la négligence envers des enfants et qui sont tenus d’intervenir.

Le protocole de responsabilité d’aider du gouvernement fédéral s’appliquerait aux départements suivants : Sécurité publique Canada, Santé Canada, Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord, Services aux Autochtones Canada, Service correctionnel Canada, Emploi et Développement social Canada, Défense nationale et les Forces armées canadiennes et Anciens combattants Canada.

Un protocole de responsabilité d’aider imposerait l’obligation positive à ces organismes publics de demander des renseignements au sujet de la situation de logement d’une personne et de faire en sorte de résoudre son problème d’itinérance au besoin. Une personne peut refuser l’aide ou avoir déjà trouvé un lieu d’hébergement, mais le protocole éliminerait la pratique actuelle qui consiste à présumer que les personnes ont accès à un logement approprié.

Le protocole de responsabilité d’aider n’exigerait pas que les organismes responsables construisent, financent ou fournissent des logements, mais crée plutôt une obligation d’aider les gens à leur charge qui sont identifiés comme étant à risque d’itinérance ou de situation de vulnérabilité établie et qui ont besoin d’une aide au logement.

Recommendations

11.1 Le Comité recommande que le gouvernement du Canada crée une stratégie nationale pour éliminer l’itinérance et s’engage à la mettre en œuvre. La Stratégie fournirait une feuille de route pour l’action fédérale, une base pour cibler les investissements de la Stratégie nationale sur le logement et un véhicule pour la collaboration avec les gouvernements provinciaux, territoriaux, municipaux et autochtones.

11.2 Le Comité recommande que le gouvernement cible mieux les personnes à risque d’itinérance en s’assurant que :

  • les nouveaux investissements en logement assurent que les logements créés sont abordables pour les gens qui bénéficient des programmes provinciaux de soutien du revenu et priorisent le logement avec services de soutien;
  • les investissements dans les nouveaux logements abordables avec services de soutien sont coordonnés avec les plans communautaires locaux de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance;
  • l’Allocation canadienne d’aide au logement cible spécifiquement les personnes en situation d’itinérance et les personnes qui ont d’extrêmes besoins impérieux en matière de logement, et elle est remise directement aux ménages qui en ont besoin (et non associée à un logement).

11.3 Le Comité recommande qu’un protocole lié à la responsabilité d’aider soit élaboré dans tous les ministères et organismes fédéraux et dans le cadre des exigences des programmes de financement, et que ce protocole soit inscrit dans la loi habilitante de la Stratégie nationale sur le logement, car c’est le meilleur moyen de réaliser une approche du logement fondée sur les droits, comme le prévoit la stratégie.

12. Harmoniser la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance avec la Stratégie nationale sur le logement et coordonner les mesures fédérales sur l’itinérance

La prévention et la réduction de l’itinérance chronique et épisodique font appel à une coordination étroite entre les stratégies fédérales qui visent à appuyer les plus vulnérables dans la société en améliorant leur capacité de participer pleinement à leur collectivité.

Discussion

Les membres du Comité ont souligné que la prévention et la réduction de l’itinérance chronique et épisodique nécessitent une coordination étroite entre la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance, la Stratégie nationale sur le logement, la Stratégie fédérale pour la réduction de la pauvreté à venir, la Stratégie pour prévenir et contrôler la violence fondée sur le sexe et plusieurs ministères et organismes du gouvernement fédéral (par exemple la Société canadienne d’hypothèques et de logement, Anciens combattants Canada, Services aux Autochtones Canada).

Aux États-Unis, le United States Interagency Council coordonne la réponse fédérale américaine à l’itinérance en travaillant en partenariat avec 19 organismes fédéraux. En regroupant et en appuyant des dirigeants tels que les gouverneurs, les maires, les dirigeants du Continuum de soins et d’autres représentants locaux, ils appuient les mesures visant à atteindre les objectifs du plan stratégique fédéral de prévention de l’itinérance.

Le Comité voulait également souligner expressément la possibilité pour la Stratégie nationale sur le logement de mettre en œuvre un programme de prestation nationale de logement transférable. Cette prestation revêt la forme d’un paiement (comme un supplément de loyer) effectué directement en faveur des ménages pour réduire les coûts de logement élevés. Elle est le moyen le plus immédiat et le plus efficace de répondre aux besoins impérieux en matière de logement, de réduire les besoins impérieux en matière de logement et de fournir de l’aide aux ménages qui vivent ou qui risquent de vivre dans l’itinérance. Elle viendrait offrir un soutien essentiel à la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance et créer la meilleure stratégie pour réussir à mettre fin au retour à l’itinérance. Les recherches montrent que, dans la grande majorité des cas (plus de 85 %), l’itinérance au Canada est attribuable à des problèmes d’abordabilité du logement.

Recommendations

12.1 Que la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance soit harmonisée, et coordonnée avec la Stratégie nationale sur le logement et qu’elle accorde une attention particulière pour créer un chevauchement des programmes, dans le but d’assurer une prestation de services intégrée, afin que les 2 stratégies se renforcent mutuellement et que les investissements fédéraux en logement soutiennent les objectifs de prévention et de réduction de l’itinérance.

12.2 Que le financement de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance puisse être combiné à d’autres programmes en matière de logement pour créer un programme plus efficace et robuste, et plus particulièrement faire en sorte que la restriction d’utiliser les fonds de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance dans le logement privé ne soit plus une condition.

12.3 Qu’Emploi et Développement social Canada crée un organe de coordination modélisé sur le United States Interagency Council qui coordonnerait les efforts du Canada pour prévenir et réduire l’itinérance.

12.4 Que les objectifs de la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance et de la Stratégie pour la réduction de la pauvreté se renforcent mutuellement, et que tout nouveau soutien du revenu mis en place par le gouvernement du Canada n’entraîne pas une réduction des mesures de soutien du revenu existantes pour une personne.

12.5 Le langage de la Stratégie nationale sur le logement qui fixe un objectif de 50 % de réduction de l’itinérance chronique parmi les « usagers de refuges » est formulé d’une manière discriminatoire à l’égard des femmes et des jeunes en raison de la manière dont ces derniers vivent l’itinérance. Le Comité recommande que ce libellé soit corrigé en supprimant la référence à l’utilisation des refuges.

Annexe 1

Les appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation

Reconciliation

La Commission de vérité et de réconciliation a défini la réconciliation comme un processus continu d’établissement et de maintien de relations respectueuses et a énoncé 10 principes directeurs de vérité et de réconciliation pour aider les Canadiens à aller de l’avant.Note de bas de page 25

Ces principes sont énumérés ci-dessous à titre de référence et pour renforcer l’idée que le logement est un moyen essentiel de réaliser les droits des Autochtones par l’intermédiaire d’un programme de logement.

  1. La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones constitue le cadre pour la réconciliation à tous les niveaux et dans toutes les sphères de la société canadienne.
  2. Les peuples des Premières Nations, Inuit et Métis, en tant que peuples d’origine de ce pays et en tant que peuples ayant droit à l’autodétermination, ont des droits issus des traités, des droits constitutionnels et des droits de l’homme qui doivent être reconnus et respectés.
  3. La réconciliation est un processus de guérison des relations qui nécessite le partage public de la vérité, la présentation d’excuses et la commémoration, qui reconnaît et corrige les torts passés.
  4. La réconciliation requiert des mesures constructives pour mettre un terme aux séquelles permanentes du colonialisme, séquelles qui ont eu une incidence destructrice sur l’éducation des peuples autochtones, leur culture et leur langue, leur santé, le bien-être des enfants, l’administration de la justice, ainsi que sur les occasions et la prospérité économiques.
  5. La réconciliation doit créer une société plus équitable et inclusive en éliminant les écarts sur le plan social, économique et de santé qui existent entre les Autochtones et les Canadiens non-autochtones.
  6. Tous les Canadiens, en tant que personnes visées par un traité, partagent la responsabilité d’établir et de maintenir des relations basées sur le respect mutuel.
  7. La perspective et la compréhension des aînés et des gardiens de la connaissance traditionnelle autochtones en matière d’éthique, de concepts et de pratiques de réconciliation sont vitales pour la réconciliation à long terme.
  8. Il est essentiel de soutenir la revitalisation culturelle des peuples autochtones et d’intégrer les systèmes de connaissances, les histoires orales, les lois, les protocoles et les liens avec le territoire des Autochtones dans le processus de réconciliation.
  9. La réconciliation requiert de la volonté politique, un leadership conjoint, un renforcement de la confiance, de la responsabilité et de la transparence, ainsi qu’un important investissement de ressources.
  10. La réconciliation requiert l’éducation du public et un dialogue soutenus, incluant l’engagement de la jeunesse, sur l’histoire et l’héritage des pensionnats, des traités et des droits autochtones, ainsi que sur les contributions historiques et contemporaines des peuples autochtones à la société canadienne.

Afin de réparer les séquelles des pensionnats indiens et de faire progresser la réconciliation, la Commission de vérité et de réconciliation a lancé 94 appels à l’action.Note de bas de page 26

Protection de l’enfance

1. Nous demandons au gouvernement fédéral, aux gouvernements provinciaux de même qu’aux gouvernements autochtones de s’engager à réduire le nombre d’enfants autochtones pris en charge en ayant recours aux moyens suivants :

ii. l’affectation de ressources suffisantes pour permettre aux communautés autochtones et aux organismes de protection de l’enfance de garder les familles autochtones ensemble, dans les cas où il est sécuritaire de le faire, et de garder les enfants dans des environnements adaptés à leur culture, quel que soit l’endroit où ils habitent;

v. l’établissement d’une exigence selon laquelle tous les décideurs du milieu de la protection de l’enfance doivent tenir compte des répercussions de l’expérience des pensionnats sur les enfants et sur ceux qui leur fournissent des soins.

3. Nous demandons à tous les ordres de gouvernement de voir à la pleine mise en œuvre du principe de Jordan.

Langues et culture

13. Nous demandons au gouvernement fédéral de reconnaître que les droits des Autochtones comprennent les droits linguistiques autochtones.

Santé

18. Nous demandons au gouvernement fédéral, aux gouvernements provinciaux et territoriaux ainsi qu’aux gouvernements autochtones de reconnaître que la situation actuelle sur le plan de la santé des Autochtones au Canada est le résultat direct des politiques des précédents gouvernements canadiens, y compris en ce qui touche les pensionnats, et de reconnaître et de mettre en application les droits des Autochtones en matière de soins de santé tels qu’ils sont prévus par le droit international et le droit constitutionnel, de même que par les traités.

20. Afin de régler les conflits liés à la compétence en ce qui a trait aux Autochtones vivant à l’extérieur des réserves, nous demandons au gouvernement fédéral de reconnaître les besoins distincts en matière de santé des Métis, des Inuits et des Autochtones hors réserve, de respecter ces besoins et d’y répondre.

21. Nous demandons au gouvernement fédéral de fournir un financement à long terme pour les besoins des centres autochtones, nouveaux et de plus longue date, voués au traitement de problèmes de santé physique, mentale, émotionnelle et spirituelle avec lesquels doivent composer les Autochtones et qui découlent de leur expérience dans les pensionnats, et de veiller à accorder la priorité au financement de tels centres de traitement au Nunavut et dans les Territoires du Nord-Ouest.

22. Nous demandons aux intervenants qui sont à même d’apporter des changements au sein du système de soins de santé canadien de reconnaître la valeur des pratiques de guérison autochtones et d’utiliser ces pratiques dans le traitement de patients autochtones, en collaboration avec les anciens et les guérisseurs autochtones lorsque ces patients en font la demande.

Réconciliation : Les gouvernements canadiens et la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones

43. Nous demandons aux gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux de même qu’aux administrations municipales d’adopter pleinement et de mettre en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones dans le cadre de la réconciliation.

44. Nous demandons au gouvernement du Canada d’élaborer un plan d’action et des stratégies de portée nationale de même que d’autres mesures concrètes pour atteindre les objectifs de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

Conseil national pour la réconciliation

55. Nous demandons à tous les ordres de gouvernement de fournir des comptes rendus annuels ou toutes données récentes que demande le Conseil national de réconciliation afin de permettre à celui-ci de présenter des rapports sur les progrès réalisés en vue de la réconciliation. L’information ainsi communiquée comprendrait, sans toutefois s’y limiter :

ii. une comparaison en ce qui touche le financement destiné à l’éducation des enfants des Premières Nations dans les réserves et à l’extérieur de celles-ci.

L’éducation en vue de la réconciliation

65. Nous demandons au gouvernement fédéral, par l’intermédiaire du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada, et en collaboration avec les peuples autochtones, les établissements d’enseignement postsecondaire, les éducateurs de même que le Centre national pour la vérité et réconciliation et ses institutions partenaires, d’établir un programme national de recherche bénéficiant d’un financement pluriannuel pour mieux faire comprendre les facteurs associés à la réconciliation.

Annexe 2

Destinataire : Jean-Yves Duclos, ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social et Adam Vaughan, Secrétaire parlementaire du ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social

Expéditeur-trice : Pierre Gaudreau, Directeur du RAPSIM et Jimena Michea, Coordonnatrice du RAIIQ

Objet : Notes sur le rapport final du Comité consultatif en itinérance

À titre de membres du Comité consultatif sur itinérance, nous avons eu le privilège, au cours de visites dans plusieurs villes canadiennes, de partager à des échanges et des réflexions avec des acteurs œuvrant à prévenir et réduire l’itinérance. Nous saluons l’initiative du gouvernement fédéral dans la mise en place d’une vaste consultation sur l’itinérance à travers le Canada. Nous voulons aussi souligner l’engagement indéniable des membres du Comité et du secrétaire parlementaire dans la lutte à l’itinérance.

Les travaux étant finalisés, il apparait cependant pour nous important d’émettre des réserves quant à la vision et aux orientations contenues dans le rapport final. Nous souhaitons également rappeler les éléments du programme fédéral Stratégie de partenariats de lutte contre l'itinérance qui ont été, jusqu’à présent, bénéfiques pour prévenir et réduire l’itinérance au Québec, et qui, selon nous, devraient être conservés.

Planification communautaire locale

La planification communautaire locale a été déterminante dans le déploiement des actions en matière de lutte à l’itinérance au Québec.

Cet exercice a donné la possibilité aux communautés de réunir plusieurs acteurs de divers secteurs concernés pour le développement d’une vision globale de la lutte à itinérance et la mise en œuvre d’actions concertées pour prévenir et réduire le phénomène. Il a permis de répondre efficacement aux besoins des personnes en situation d’itinérance.

Le plan communautaire a favorisé le déploiement d’une variété d’interventions et de façonner celles-ci selon les besoins des collectivités. Ainsi, les choix faits à Québec et Montréal depuis 18 ans ont été bien différents mais tout aussi pertinents pour lutter contre l'itinérance. À Québec un fort accent a été mis sur la prévention et l'action auprès des jeunes alors qu'à Montréal, les priorités locales, sauf dans le cadre de la Stratégie de partenariats de lutte contre l'itinérance Logement d’abord pour les exercices financiers de 2015 à 2019 ont toujours permis une utilisation importante des fonds pour contribuer aux installations des organismes et aux développements de logements sociaux.

La planification communautaire locale est une option qui doit demeurer possible.

Approche globale

La volonté de privilégier une approche spécifique dans la lutte à l'itinérance demeure également une divergence majeure. Bien que Logement d’abord constitue une approche efficace pour augmenter l’accès au logement aux personnes en situation d’itinérance, elle ne peut pas répondre aux multiples facettes du phénomène. L'itinérance est complexe. L’intervention en prévention et réduction de l'itinérance doit agir sur le logement au même titre que la santé et les services sociaux, le revenu, l'éducation et l'insertion, la cohabitation et la judiciarisation. Le gouvernement doit aussi lutter contre les préjugés, la stigmatisation et l’exclusion à l’égard des personnes.

Comme nous l'avons exprimé dans le cadre des rencontres du Comité, comme cela a aussi été affirmé par différentes personnes aux tables rondes de Québec et Montréal, l’itinérance nécessite une multitude de réponses. Travail de rue, aide alimentaire, programmes d'insertion sociale et professionnelle, rénovation et construction de refuges ou de centres de jour, soutien communautaire en logement sont toutes des réponses à la diversité de besoins des personnes en situation d'itinérance ou à risque de l'être. Il est essentiel d'adopter une approche globale qui couvre toutes les dimensions de la réalité des personnes vivant l’itinérance pour répondre efficacement.

L'imposition d'une approche systémique de gestion de l'itinérance nous apparait dangereuse et contre-productive pour le développement et le maintien de liens avec une partie importante des personnes en situation d'itinérance ainsi qu'en opposition avec l'approche d'un grand nombre d'organismes.

Une intervention en amont

Un programme efficace en itinérance doit également permettre de déployer des actions visant la prévention du phénomène. Au Québec, l'itinérance est définie comme un processus de désaffiliation marqué de multiples ruptures qui mène ultimement à la rue. Accessibilité à un logement abordable et adéquat, transition à la sortie d'un établissement, soutien aux familles et aux jeunes en difficultés sont autant d'interventions qui permettront d'éviter la rue.

La présence d'un filet social (logement, revenu, accès aux services, etc.) est un facteur de protection important et participe à prévenir l’itinérance et à réduire les chances de chronicité chez les personnes en situation d'itinérance.

Conclusion

Nous sommes conscients que la révision de la Stratégie de partenariats de lutte contre l'itinérance n’est pas un exercice simple. Les réalités exprimées à travers le Canada sont variées et démontrent la multitude des visages que peut prendre l’itinérance. Il est nécessaire que les communautés puissent compter sur un programme flexible pour prévenir et réduire l’itinérance.

Annexe 3

Membres du comité consultatif sur l'itinérance

Adam Vaughan (Chair): Member of Parliament for Spadina Fort–York and Parliamentary Secretary to the Minister of Families, Children and Social Development (Housing and Urban Affairs)

Robert Byers: President and CEO, Namerind Housing Corporation, Chair, Indigenous Caucus, Canadian Housing and Renewal Association, Regina, Saskatchewan

Amanda DiFalco: Manager, Homelessness Policy and Programs, City of Hamilton, Hamilton, Ontario

Stephen Gaetz: Professor, Faculty of Education, York University and Director of the Canadian Observatory on Homelessness/Homeless Hub, Toronto, Ontario

Pierre Gaudreau: Coordinator, Réseau d'aide aux personnes seules et itinérants de Montréal (RAPSIM), Montréal, Quebec

Arlene Haché: Community Advocate and Program Developer, Temiskaming Native Women's Support Group Yellowknife, Northwest Territories

Charlotte Hrenchuk: Whitehorse, Yukon, Executive Director, Yukon Status of Women Council

Holly Jarrett: Co-founder and Member, Lived Experienced Advisory Council, Canadian Alliance to End Homelessness, Wakefield, Quebec

Susan McGee: CEO, Homeward Trust Edmonton, Edmonton, Alberta

Katherine McParland: Youth Homelessness Manager, United Way Thompson Nicola Cariboo / A Way Home Committee to End Youth Homelessness, Kamloops, British Columbia

Jimena Michea: Coordinator, Regroupement pour l'aide aux itinérants et itinérantes de Québec, Québec, Quebec

Karen O'Shannacery: Former Executive Director, Lookout Emergency Aid Society, Vancouver, British Columbia

Bruce Pearce: Community Development Worker, End Homelessness St. John's, St. John's, Newfoundland and Labrador

Tim Richter: President and CEO, Canadian Alliance to End Homelessness, Calgary, Alberta

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